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Laurent Fontaine(03-2008)
e-mail: fontlau@hotmail.com



    Les écorces de pin sont depuis longtemps utilisées en horticulture pour pailler les massifs et éviter la prolifération des mauvaises herbes. Dans certaines petites exploitations agricoles, elles constituent encore de nos jours une litière peu coûteuse pour les bovins. Dans les parcs animaliers, leur utilisation est relativement récente et réservée, en général, aux primates, à titre d'enrichissement du milieu. Il nous a semblé que ce type de litière pourrait répondre aux contraintes techniques et sanitaires qu'impose la conservation d'espèces menacées, en captivité, c'est pourquoi nous avons testé cet écosol au Parc de Clères, avec divers oiseaux et plus spécialement avec nos faisans.
 

La mise en place de nos essais


    Dans un premier temps, nous avons installé l'écosol dans quelques volières, puis au fur et à mesure des besoins de renouvellement des litières, dans des types variés d'installations (intérieur chauffé ou non chauffé, extérieur couvert ou non couvert, sol bétonné ou sol naturel) et avec de nombreuses espèces (phasianidés, colombidés, limicoles, grues, psittacidés et primates). Cette grande diversité dans les conditions d'étude n'a pas permis un suivi journalier ni l'établissement de statistiques mais notre expérimentation conduite de manière un peu empirique, nous a cependant fourni de nombreuses informations utiles.
    Le présent compte rendu concerne plus spécialement l'utilisation des écosols avec les faisans. Nous avons utilisé ces écosols dans ce que nous appelons à Clères, les "volières anglaises". Il s'agit de 42 volières semblables, groupées en blocs de 6 à 10 volières d'un mètre de large sur 5 mètres de long avec une partie grillagée couverte et un abri. Seul le sol de l'abri est bétonné, le reste est constitué de terre et de gravier. A l'intérieur nous avons été obligés de limiter l'épaisseur de l'écosol à quelques centimètres afin de ne pas gêner l'ouverture des portes. A l'extérieur, la couche d'écorces de pin atteint 20 à 30 cm. Dans quelques volières-témoins, nous avons conservé du sable afin de pouvoir comparer l'entretien des deux types de litière sur une longue période.
 

Quelques difficultés


    L'accumulation de matière organique est apparue dans des volières dans lesquelles les plats sont posés directement sur la litière. Malgré un nettoyage quotidien, l'écorce a été rapidement saturée de restes d'aliments qui, à cause de l'humidité, moisissent et deviennent dangereux pour la santé des oiseaux. Nous savons que c'est son acidité qui confère à l'écosol son pouvoir inhibiteur sur la germination des graines et le développement des bactéries et des moisissures. L'acidité des litières a été mesurée grâce à du papier pH. Une litière normale à un pH acide (de 5 à 6) tandis qu'une litière sale à un pH basique (9 à 10 voir plus sous les perchoirs).
    La présence de nombreuses souris, constitue une difficulté sérieuse. Elles sont attirées par les restes de nourriture et installent leurs nids dans des galeries qu'elles creusent dans le sol des parties extérieures non bétonnées des volières… quand ce n'est pas sous les quelques plats posés directement sur la litière. En creusant, elles mélangent du sable et de la terre du sous-sol aux écorces et leurs déjections aggravent l'accumulation de matière organique dans la litière. Les souris sont aussi des vecteurs de zoonoses pour les humains, aussi bien que pour les oiseaux. La prolifération des souris est liée au manque d'étanchéité de nos installations. Nous avons pu constater que des souris élevées uniquement dans de l'écosol ne pouvaient pas y construire de nid faute de plafond les écorces de pin s'effondrent. La prolifération des souris serait sans doute arrêtée si l'écosol était disposé sur un sol entièrement bétonné.
    Nous avons aussi constaté une légère augmentation du parasitisme chez les oiseaux. Yannick Roman, le vétérinaire du Parc et Jean-Marie Canonville, un de ses stagiaires, réalisent actuellement une étude du parasitisme chez les oiseaux de Clères afin de mettre en place un protocole de vermifugation. Une première étude coprologique a montré que dans les volières sur écosol, le nombre de faisans parasités avait légèrement augmenté. Cette légère augmentation du parasitisme est sans doute liée aux vers de terre, hôtes de nombreux parasites, qui remontent du sol couvert par les écorces de pin, d'où –une fois de plus– l'intérêt de disposer d'un sol étanche, d'une dalle bétonnée. La suite de l'étude nous apportera sans doute des informations plus précises.
    La dernière difficulté que nous avons rencontrée est liée au mode de vie des faisans. Le sable permettait aux faisans de se poudrer, limitant ainsi naturellement les parasites externes. De plus, les oiseaux trouvaient dans le sable, les gravillons nécessaires à la digestion mécanique des graines. Nous espérons résoudre ces problèmes rapidement en incorporant du sable de rivière lavé à la ration alimentaire et en aménageant des bacs de poudrage dans chaque volière.
 

Les avantages de l'écosol


    Notre expérimentation a mis en évidence certains inconvénients liés à l'utilisation des écorces de pin qui nous semblent facilement surmontables. Les avantages de ce type de litière nous sont apparus particulièrement intéressants.
    En ce qui concerne le travail, la manipulation des écorces est nettement moins fatigante que celle du sable. L'entretien est simple. Il suffit de procéder régulièrement à un nettoyage superficiel, de conserver la litière légèrement humide et de la brasser de temps en temps. Avec un équipement minimum (tuyau d'arrosage et râteau) et un peu d'entraînement, le temps d'entretien n'est pas supérieur à celui nécessité par le sable. De plus, cette litière peut supporter occasionnellement un entretien limité qu'il est ensuite facile de rattraper.
Au plan financier, l'écorce est plus chère que le sable à volume égal. Cependant la durée d'utilisation de l'écosol est nettement plus longue que celle du sable, d'où un coût global plus faible. De plus, le traitement des litières usagées est moins pénible et plus facile car, une fois sèches, les écorces peuvent être aisément incinérées, ce qui est un net avantage sanitaire.
    Pendant l'hiver, nous avons constaté que l'écosol fournit une bonne isolation thermique, optimisée par un apport de tourbe blonde et la limitation de l'arrosage pour éviter le risque de gel. Nous avons essayé différents dosages de la tourbe. La tourbe pure, utilisée en intérieur uniquement, a tendance à sécher trop vite et à se transformer en poussière, d'où un risque d'aspergillose. L'isolation thermique que procure l'écosol est particulièrement intéressante avec les oiseaux exotiques dont les pattes craignent le contact d'un sol trop froid.
    L'écosol présente un grand intérêt pour l'élevage des faisans car il offre aux faisanes un excellent substrat de ponte qui limite le nombre d'œufs cassés.
    Enfin, le dernier avantage concerne le comportement naturel des faisans l'écosol leur offre un sol facile à creuser. Par exemple, les éperonniers de Chinquis qui ne sont pas vraiment de grands fouisseurs réussissent à brasser et retourner plusieurs fois dans la même journée l'ensemble de leur litière, ce qui nous a étonnés. Pour ce qui est des vrais piocheurs (Hoki, Wallich, Lophophore), nous n'avons actuellement qu'un seul Hoki blanc sur écosol. Il vient de découvrir sa nouvelle litière mais il ne justifie pas encore sa réputation de "bulldozer des volières" .
 

Conclusion


    En guise de conclusion provisoire, je propose le plan d'une installation adaptée à l'utilisation des écosols. Une bonne gestion de ce type de litière suppose la maîtrise de plusieurs facteurs. Il convient d'abord d'assurer une humidité optimale par le drainage ou l'humidification. Il faut aussi limiter les apports de matières organiques en procédant fréquemment à des nettoyages légers ( "spot cleaning") et éliminer les souris. Un brassage régulier de la litière permettra d'exploiter au maximum son pouvoir inhibiteur sur le développement des moisissures, des bactéries et la germination des graines. Il reste des points à éclaircir concernant les qualités de l'écosol (son étude bactériologique, le rôle de l'acidité, etc.) et concernant les litières en général.
 

Si vous avez des informations, des suggestions, des questions, n'hésitez pas à me contacter directement.

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